La logistique, avant et pendant le tournage

En dehors du plateau, l’équipe devra installer son matériel, ses camions. Il lui faudra éventuellement mettre en place une cantine, des vestiaires, des loges… Population et production vont devoir cohabiter pendant le tournage. Une bonne préparation logistique permet de limiter la gêne pour les uns comme pour les autres.

Le stationnement des camions

Essentiel pour la production et source de dérangement pour la commune, le stationnement des camions est un véritable enjeu à aborder dès les visites de repérage si possible. Par souci d’efficacité, de sécurité et de confort, l’équipe de tournage a besoin de stationner ses véhicules au plus près du décor, et idéalement au sein même du lieu de tournage.

L’espace, le plus proche possible du décor mais le moins gênant pour les riverains, devra être suffisamment large ou étendu pour garer les camions, supporter leur poids et concentrer toute l’équipe.

La commune devra émettre un arrêté autorisant le stationnement en précisant les voies concernées. À noter, la totalité des communes du Grand Est pratique la gratuité du stationnement des véhicules techniques lors du tournage.

L’interruption de la circulation

Le tournage d’une scène peut amener à bloquer une rue entière, un carrefour. Si les productions s’efforcent de réduire au maximum la gêne occasionnée, il faut se préparer en évaluant, avec le régisseur, les zones concernées, la durée de l’interruption nécessaire, les restrictions éventuelles. Là encore, c’est un point à aborder lors des visites de repérage et des réunions de préparation, plan de voirie à l’appui.

L’information aux habitants et usagers passera par la signalisation temporaire municipale, mais la production prendra également part à la communication avec les commerces et habitants.

Concernant la déviation des personnes et des véhicules conformément à l’arrêté municipal, la production apprécie l’appui de la police municipale ou de forces de l’ordre disponibles sur le territoire.

Restauration et hébergement

Une cantine est toujours assurée sur le tournage. La commune propose un espace pour l’implanter, non loin du plateau où l’équipe pourra installer une tente, des tables, etc. Durant la saison froide, la mise à disposition de locaux chauffés est particulièrement appréciée.

La commune peut mobiliser les restaurateurs locaux afin d’offrir des solutions de cantine. Les prix seront négociés directement par la production. La fourniture des repas implique de prendre en considération le planning varié des différentes équipes. Parfois, la production prépare elle-même les repas. Dans ce cas, la commune peut fournir une liste de magasins et de producteurs locaux auprès desquels s’approvisionner.

Les équipes de tournages sont composées de techniciens locaux, mais venant aussi parfois d’autres villes du Grand Est, ou d’autres régions. Pour l’hébergement des équipes, la production aura donc besoin de trouver des solutions au plus près du camp de base du tournage, là où l’essentiel du film se tourne, ou parfois au plus près de décors spécifiques utilisés plus brièvement.
La commune, avec l’appui de l’office du tourisme ou du Comité Régional du Tourisme, peut mettre à disposition une liste d’hébergements, hôtels ou gîtes, dans les environs.

La mise à disposition de locaux

Les équipes ont besoin d’espaces techniques pour la préparation puis le tournage. Il leur faut des ateliers pour fabriquer, stocker décors et costumes, des loges pour les comédiens et figurants, des bureaux pour l’équipe de production… Outre les décors, la commune pourra proposer une mise à disposition gracieuse de locaux lors de la visite de repérage.

La sécurité

Le bon déroulement du tournage et l’installation de l’équipe de tournage supposent un encadrement de la sécurité.

En raison de son pouvoir de police, il revient à la commune d’enjoindre la production de s’assurer de la sécurité des biens et des personnes lors du tournage, que cela concerne les interdictions et limitations d’accès au plateau ou les zones de stationnement.

La commune peut, par arrêté, préciser les espaces interdits ou limités pendant la durée du tournage pour des raisons de sécurité. Elle évaluera, en concertation avec la production, et pour chaque décor, l’éventuelle nécessité de la présence d’un dispositif préventif ou de pompiers. Une refacturation de ce service (redevance équivalente au coût brut des salaires) est possible.

Les aléas d’un tournage

Bien que le tournage soit organisé minutieusement suivant un calendrier et un plan de travail rigoureux, fabriquer un film reste une activité empirique. Un tournage est soumis à toutes sortes d’aléas : météo, difficultés techniques, maladie d’un membre de l’équipe ou d’un comédien. Ne sachant quels problèmes inattendus elle aura à surmonter, l’équipe de tournage sera rassurée de pouvoir compter sur la mobilisation possible d’un cadre communal.

Besoins humains et ressources techniques

Toute mise à disposition de locaux qui entraînerait des coûts supplémentaires, en termes de personnels ou de consommations de fluides (raccordement au réseau électrique, eau, chauffage, etc.) peut être refacturée à la production. Il est préférable de l’indiquer dès le début des négociations et de le stipuler sur la grille tarifaire.

Calendrier type

De façon générale, les autorisations de tourner devront faire l’objet d’une étude de principe courte (délai de 5 jours ouvrables) pour permettre à une production d’établir raisonnablement son plan de travail.

Une fois la phase de pré-repérage et d’organisation logistique achevée, la commune et la production signent la convention établissant l’autorisation de tournage, au minimum une semaine avant le début du tournage.

Au cours de cette semaine, la commune prépare concrètement les éléments convenus avec la production. Les différents services concernés entrent en action. Le plan de travail du tournage, élaboré par le chargé d’accueil, permettra d’aménager l’agenda d’organisation pour la commune. Il est recommandé d’informer la population au moins 2 à 3 jours à l’avance.

Témoignage

Stéphan Guillemet, régisseur général, membre de l’Association française des régisseurs (AFR)

Retour sur le tournage de la saison 2 de la série "Zone Blanche" à Gérardmer (88), 2019

"Avec le temps, collectivités et productions ont appris à se comprendre."

"Un régisseur de cinéma ou télé est à la fois un logisticien et un facilitateur. Les aspects financiers et administratifs nous incombent dans les négociations avec les lieux où nous tournons. Nous cherchons aussi des fournisseurs, des professionnels et des locaux pour les moyens techniques et logistiques. Les relations qu’on noue avec les villes et les entreprises à proximité sont primordiales. Même si, malheureusement, on ne trouve pas tout dans une région, nous donnons la priorité au local, question d’efficacité et de bon sens.
Pour "Zone Blanche", le plus gros du travail de préparation avait été fait par mes prédécesseurs lors de la saison 1. Il nous fallait trouver un local pour que l’équipe déco puisse travailler, mais aussi des bureaux pour la production et l’équipe mise en scène, un stockage de meubles… La règle dans le métier veut qu’il y ait au moins un jour de préparation en amont pour un jour de tournage.

À Gérardmer, nous étions attendus et encore mieux accueillis que l’année précédente. Le territoire avait compris les retombées, à la fois économiques et en termes d’image, qu’il pouvait tirer du tournage. La série a su mettre en valeur la région. Cela faisait plaisir aux habitants, ils étaient fiers et toujours intéressés, curieux, plein d’envies. Certains ont fait de la figuration. Et vu le succès de la saison 1, une association des anciens figurants a même vu le jour.

L’Office national des forêts comme la Direction des routes étaient réactifs. Pour le reste, tout était cadré et anticipé par la ville de Gérardmer où nous avions installé le camp de base pour loger l’équipe durant les 45 jours de tournage, profitant de sa situation géographique centrale et de sa grande capacité hôtelière. Lors d’une session de double plateau, qui nécessite la présence simultanée de deux réalisateurs et deux équipes, 150 personnes étaient présentes. Mis à part quelques branchements quand c’était possible, nous étions autonomes en énergie afin de pouvoir tourner en pleine forêt.
La directrice générale des services de la commune a été notre interlocutrice unique. Très à l’écoute, elle transmettait nos demandes au service concerné. Pouvoir compter sur un référent au sein d’une équipe municipale, qui connaît bien le fonctionnement de la collectivité et ne perd pas de temps à chercher la réponse, c’est un gage d’efficacité pour tous.

Dans les petites communes, les prises de décisions sont rapides, on peut être en contact direct avec les élus, qui téléphonent, se déplacent sur le terrain. On se sent accompagnés, véritablement soutenus. Avec le temps, collectivités et productions ont appris à se comprendre. Les communes ne s’étonnent plus de nos demandes un peu farfelues, fantaisistes, ni des délais parfois courts qui les assortissent !"

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